Monsieur le Député,

Paris, 

le 5 JUIL. 2023

Les composés alkylés per et polyfluorés ou PFAS sont une large famille de substances chimiques (plus de 4 000 composés) fabriquées depuis les années 1950 et utilisées dans de nombreuses applications industrielles et produits de consommation courante. L’origine de la présence des PFAS dans l’environnement est donc anthropique et leur utilisation variée, combinée à leur caractère très persistant, entraîne une contamination de tous les milieux l’eau (eaux de surface et eaux souterraines), l’air, les sols ou encore les sédiments, et notamment autour de certaines installations industrielles. Certains de ces composés chimiques s’accumulent dans les organismes vivants et se retrouvent dans la chaîne alimentaire. D’autres, plus mobiles, sont transportés sur de très longues distances.

L’exposition à certains de ces composés pourrait générer des effets néfastes sur la santé. Des études scientifiques ont associé l’exposition à des PFAS et certaines pathologies : effets sur la reproduction et la fertilité, maladies de la thyroïde, certains cancers (rein, testicule), lésions hépatiques, effets sur le système immunitaire (diminution de la réponse immunitaire à la vaccination) ou encore sur le métabolisme lipidique (taux élevé de cholestérol). Plusieurs cas de contaminations ont été mis au jour en Europe, en France, mais également en Belgique, en Allemagne et aux Pays-Bas, ainsi qu’aux Etats-Unis. La plupart des Etats étrangers ont mis en place des programmes d’action. Ils ont également pris des mesures pour limiter la présence de PFAS dans certains produits (emballages alimentaires, etc.). De plus, un projet de restriction (au titre du règlement Reach, sur les produits chimiques)de l’usage de ces substances est en cours d’instruction au niveau de l’Union européenne. La Commission européenne s’est en effet engagée à éliminer progressivement les PFAS, en n’autorisant leur utilisation que lorsqu’il est prouvé qu’ils sont essentiels à la société. Par ailleurs, l’Agence européenne des produits chimiques a récemment lancé une phase d’expertise scientifique sur le sujet.

Pour structurer son action en réponse à ces préoccupations grandissantes, le Gouvernement a publié le 17 janvier 2023, son plan d’action ministériel sur les PFAS. Ce plan s’appuie sur six axes d’action ayant notamment pour objectifs la définition de normes réglementaires pour guider l’action publique, la réduction des émissions des industriels, l’amélioration des connaissances sur ces substances et les techniques de dépollution existantes, ainsi que la restriction de leur usage sur le marché européen. Plusieurs actions sont actuellement menées en ce sens, notamment l’élaboration d’un arrêté ministériel portant sur l’analyse des effluents industriels fortement susceptibles de contenir des PFAS ou la mise en place progressive d’une surveillance de la présence de ces substances dans les eaux destinées à la consommation humaine. Dans ce contexte et sur le fondement des études déjà réalisées sur le sujet, j’ai l’honneur de vous confier une mission, articulée autour de deux axes.

D’une part, la mission devra permettre d’actualiser et de compléter le diagnostic de la situation en France, notamment les usages des P A S et l’état de contamination des milieux. Cette mission permettra ainsi de faire un point sur la connaissance des imprégnations par les PFAS dans différents milieux, les valeurs de référence environnementales et sanitaires mises en place dans les autres pays et leur robustesse, l’état des pollutions et expositions des populations, et les moyens consacrés à la surveillance des contaminations, y compris dans la chaîne alimentaire, que le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire a récemment renforcée. Vous pourrez notamment vous appuyer sur les travaux en cours au sein de l’Anses, qui a été chargée d’une évaluation des expositions aux composés alkyles per et polyfluorés, des risques sanitaires et d’une d’un classement selon le degré de dangerosité des substances afin de définir des mesures de gestion des risques. Vous vous attacherez également à étudier le caractère essentiel ou non de certains PFAS pour des technologies cruciales pour la transition écologique, comme les membranes des électrolyseurs, piles à combustible et batteries, usagées en rapide développement. Vous pourrez en particulier documenter s’il existe des alternatives crédibles pour ces usages stratégiques pour la décarbonation de notre économie.

D’autre part, cette mission permettra de formuler des préconisations sur les éventuels renforcements du suivi, les opérations particulières à mener dans certains territoires, ou encore les suites à donner aux projets d’interdictions au niveau européen, sur leur portée et sur la façon de séquencer ces travaux dans le temps, par ordre de priorité. S’agissant d’un sujet particulièrement complexe, cette mission sera conduite en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. Vous aurez à votre disposition un membre de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable et pourrez solliciter le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux et le Conseil général de l’économie. Vous veillerez à élaborer vos recommandations dans le respect des règles d’indépendance, d’impartialité et d’objectivité qui s’imposent au titre de la loi n° 2013-907 du 1 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, et à m’informer des éventuelles mesures prises à cet effet. Le décret vous nommera, en application de l’article L.O. 144 du code électoral, parlementaire en mission auprès de M. Marc FESNEAU, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, de M. Christophe BÉCHU, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, de M. François BRAUN, ministre de la santé et de la prévention, et de M. Roland LESCURE, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.

Je souhaite pouvoir disposer de votre rapport au plus tard six mois après le début de cette mission.

Je vous prie de croire, Monsieur le Député, en l’assurance de mes salutations les meilleures.

Elisabeth Borne

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