Cette proposition de loi déposée par Olivier Falorni en 2017 vise à instituer, pour toute personne capable majeure en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, un droit à bénéficier d’une assistance médicalisée permettant, par une aide active, une mort rapide et sans douleur.
Depuis le début de la législature, pas moins de six initiatives parlementaires issues de divers groupes ont émergé à l’Assemblée nationale pour faciliter la mise en place d’un « droit à mourir dans la dignité ». Parallèlement, le 11 mars dernier, le Sénat a débattu d’une proposition de loi similaire, dans le cadre de l’ordre du jour réservé au groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. Celle-ci a été retirée en plein débat par son auteure.
Le ministre des Solidarités et de la Santé avait, à cette occasion, exprimé un avis défavorable sur le principe même de légiférer sur cette question en expliquant que « le moment choisi pour modifier le régime juridique de la fin de vie » n’était « pas le moment opportun », puisque « nous sommes (…) en plein combat face à la crise sanitaire ». Plutôt qu’une évolution de la loi, il avait alors présenté un nouveau plan national pour développer les soins palliatifs.
La question de l’ouverture d’un droit à l’euthanasie revient avec vigueur dans le débat public suite à la légalisation récente de ce procédé dans plusieurs pays européens (au Portugal le 29 janvier1 et en Espagne le 18 mars).
Il convient de rappeler qu’une telle mesure doit pouvoir faire l’objet d’une concertation et d’une consultation d’ampleur au préalable avec l’ensemble des parties prenantes (en l’espèce, le corps médical). En outre, comme pour les lois de bioéthique, il est d’usage que le Conseil National Consultatif d’Ethique (CCNE) se prononce en amont de l’examen d’un texte de cet acabit.
Calendrier législatif :
- ‒ Examen en commission des affaires sociales : mercredi 31 mars
- ‒ Examen en séance publique : jeudi 8 avril
- ‒ Rapporteur : Olivier Falorni (LT)
Pour rappel :
Loi Claeys-Léonetti |
La loi n°2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des personnes malades et des personnes en fin de vie, vise à clarifier les conditions de l’arrêt des traitements au titre du refus de l’obstination déraisonnable et instaure un droit à la sédation profonde et continue jusqu’au décès pour les personnes dont le pronostic vital est engagé à court terme. Elle propose de répondre à la demande à mourir dans la dignité par une meilleure prise en charge de la souffrance, et en clarifiant l’usage de la sédation profonde et continue, jusqu’au décès, en phase terminale et permet également de conforter la place de l’expression de la volonté du patient dans le processus décisionnel et en particulier de ses « volontés précédemment exprimées ». In concreto, la loi Claeys-Léonetti permet de : − réaffirmer le droit du malade à l’arrêt de tout traitement ; − rendre contraignantes les directives anticipées pour les médecins et développer les directives anticipées en les formalisant ; − prendre en compte les volontés exprimées par écrit sous forme de directives formalisées éventuellement contraignantes, et assurer leur accessibilité ; − à défaut de l’existence de directives anticipées, prendre en compte l’expression des volontés exprimées par le patient portées par le témoignage de la personne de confiance ou à défaut tout autre témoignage de la famille ou des proches ; − améliorer l’accès et l’utilisation des directives anticipées pour les professionnels de santé et le public. Cette loi a introduit plusieurs dispositions à destination des professionnels de santé dont : − l’obligation de mettre en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que toute personne ait le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement |
possible de la souffrance ; − une meilleure prise en compte de la souffrance réfractaire du malade en phase avancée ou terminale par des traitements analgésiques et sédatifs ; − l’obligation pour le médecin de respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix et de leur gravité, de refuser ou ne pas recevoir un traitement ; − un impératif d’information auprès de leurs patients sur la possibilité et les conditions de rédaction de directives anticipées. |
Bonjour,
Je vous adresse ci-dessous le commentaire plein de vie d’un homme qui vit la fragilité chaque jour et implore de ne pas légiférer sur l’euthanasie.
Poignant appel lancé par Philippe Pozzo di Borgo _(Intouchables)_ contre l’euthanasie (Parrain du collectif « Soulager mais pas tuer ») :
« Je lance aujourd’hui un appel solennel aux parlementaires d’aujourd’hui et de demain : n’abolissez-pas nos vies ! Surtout pas celles des plus fragiles. Vous ne vous rendez pas compte du désastre que provoque chez les personnes qui se débattent avec des vies difficiles votre soutien à l’euthanasie ou au suicide assisté comme des morts « libres, dignes et courageuses ». Aurais-je manqué de dignité, de courage et de liberté en restant en vie, moi l’intouchable, cent pour cent dépendant de l’aide d’autrui pour vivre et donc participer à la société ?
Plus d’un quart de siècle de tétraplégie, marqué – j’ose le dire – par autant de joies que de douleurs réelles, m’a vacciné contre le piège du mot « liberté » :
• En toute liberté, après mon accident, quand je ne voyais pas de sens à cette vie de souffrance et d’immobilité, j’aurais exigé l’euthanasie si on me l’avait proposée.
• En toute liberté, j’aurais cédé à la désespérance, si je n’avais pas lu, dans le regard de mes soignants et de mes proches, un profond respect de ma vie, dans l’état lamentable dans lequel j’étais. Leur considération fut la lumière qui m’a convaincu que ma propre dignité était intacte. Ce sont eux – et tous ceux qui m’aiment – qui m’ont donné le goût de vivre.
En réalité, affirmer qu’au menu de la vie on pourrait « choisir sa mort » est une absurdité et une violence, de même qu’il est absurde et violent d’exiger d’un soignant qu’il transgresse l’interdit de tuer. Car c’est cet interdit qui limite sa toute-puissance, nous met sur un pied d’égalité, m’autorise à exister et, si j’en éprouve le besoin, à me plaindre sans craindre d’être poussé vers la sortie.
On nous dit : « C’est un droit qu’on vous propose ; il ne vous enlève rien. » Mais si ! Ce prétendu droit m’enlève ma dignité, et tôt ou tard, me désigne la porte. Ne voyez-vous pas la pression – pour ne pas dire l’oppression – qui monte quand une société rend éligibles à la mort les plus humiliés, les plus souffrants, les plus isolés, les plus défigurés, les moins résistants à la pitié des autres, et – certains le revendiquent déjà – les plus coûteux ?
Avec mes amis de Soulager mais pas tuer, je lance cet appel solennel : le moment est à prendre soin les uns des autres, à accompagner chacun, à soulager toute douleur, peine et souffrance, à retisser des liens de solidarité avec les personnes malades, dépendantes, isolées. Le moment est plus que jamais à soulager, pas à tuer. »